La plupart des termes techniques, dans le domaine informatique, proviennent de la langue anglaise – ou américaine, c’est selon. Rien que de très normal : les grandes entreprises dans ce domaine sont anglo-saxonnes, et les recherches fondamentales ou appliquées s’effectuent dans la langue de Shakespeare.
La commission générale de terminologie et de néologie propose un équivalent français à tous les termes étrangers, publiés dans le journal officiel. Si certains mots tels que la « toile » (pour « web »), la « dorsale » (pour « backbone ») voir « mél » (pour « mail ») sont quasiment passés dans la langue courante, d’autres sont nettement plus exotiques voire délicats à caser dans une discussion.
Heureusement que le ridicule ne tue pas, jugez-en par vous-même.
Côté pile…
L’autre jour en rentrant du travail, mon fils me saute littéralement dessus : « Papa, y’a encore le trackball du joystick de la Wii qui ne fonctionne plus, et je ne retrouve plus le DVD de Maria Brosse. En plus, il doit y avoir un problème dans un des slots, parce que le jeu j’te raconte pas l’aliasing de malade sur les scènes de courses. »
Evidemment, c’est toujours sur moi que cela tombe. Sûr que les mécaniciens auto doivent régler le moteur de la voiture familiale tous les week-end : pareil pour les informaticiens !
Me voilà donc en train de réparer tout cela, quand la console se met à télécharger automatiquement un patch du firmware. Comme de bien entendu, c’est à ce moment que la connexion Wifi de la box a planté. Le temps de reparamétrer le DNS en off line et l’URL de connexion, le firewall me signale qu’un spam a déclenché une applet Java sur le browser du PC. Là, ça se complique. Il a fallu que je réinstalle tout le middleware en pestant : encore un hacker qui n’a rien trouvé de mieux à faire que de polluer cette vieille machine avec ses cookies.
Au bout d’une bonne heure tout était rentré dans l’ordre, mon fils s’est ensuite accaparé le PC et a passé toute la soirée en chat avec ses copains. « La prochaine fois, évite d’installer des shareware ou des add on sans m’en parler », lui dis-je. « Ce n’est pas parce que tu connais toute la panoplie des smiley que tu es bon en informatique ! Quand tu sauras changer le boot de ton PC, tu pourras causer. »
On se bat toute la journée contre le BYOD, et on rentre à la maison pour tomber sur les mêmes problèmes. Quelle vie !
Côté face…
L’autre jour en rentrant du travail, mon fils me saute littéralement dessus : « Papa, y’a encore la boule de commande du manche à balais de la Wii qui ne fonctionne plus, et je ne retrouve plus le disque numérique polyvalent de Maria Brosse. En plus, il doit y avoir un problème avec un des logements, parce que j’te raconte pas le crénalage de malade sur les scènes de courses. »
Evidemment, c’est toujours sur moi que cela tombe. Sûr que les mécaniciens auto doivent régler le moteur de la voiture familiale tous les week-end : pareil pour les informaticiens !
Me voilà donc en train de réparer tout cela, quand la console se met à télécharger automatiquement une retouche du microprogramme. Comme de bien entendu, c’est à ce moment que la connexion Wifi de la box a planté. Le temps de reparamétrer le système d’adressage par domaine en autonome et l’adresse universelle de connexion, la barrière de sécurité me signale qu’un arrosage a déclenché une appliquette Java sur le navigateur de l’ordinateur. Là, ça se complique. Il a fallu que je réinstalle tout le logiciel médiateur en pestant : encore un fouineur qui n’a rien trouvé de mieux à faire que de polluer cette vieille machine avec ses témoins de connexion.
Au bout d’une bonne heure tout était rentré dans l’ordre, mon fils s’est ensuite accaparé l’ordinateur personnel et a passé toute la soirée en causette avec ses copains. « La prochaine fois, évite d’installer des logiciels à contribution ou des additifs sans m’en parler », lui dis-je. « Ce n’est pas parce que tu connais toute la panoplie des frimousses que tu es bon en informatique ! Quand tu sauras changer l’amorce de ton ordinateur, tu pourras causer. »
On se bat toute la journée contre le AVEC, et on rentre à la maison pour tomber sur les mêmes problèmes. Quelle vie !
Conclusion
Bien évidemment, la préoccupation de maintien d’une langue est primordiale. Une infographie dans le numéro 1586 du Courrier International mentionne l’existence de 7000 langues vivantes de par le monde, dont plus de la moitié est menacée et aura disparu d’ici 2100. La globalisation aura aussi eu un effet sur les langues, puisque dix d’entre elles couvrent plus de la moitié de la population mondiale, qu’il s’agisse de la langue maternelle ou d’une seconde langue.
Cela étant, il faut trouver le juste milieu entre ce qui relève de la normalisation et ce qui relève de l’évolution des usages. Un mot anglais tel que « design » par exemple n’a pas d’équivalent en Français : il est souvent amalgamé avec la notion d’esthétique, alors qu’en fait il désigne beaucoup plus (facilité d’utilisation, image de marque, image sociale, etc.) : inventer un terme français ex-nihilo est donc plus que discutable. A contrario, un mot tel que « mèl » a fini par passer dans le langage courant : phonétique identique à son homologue anglo-saxon, taille comparable en nombre de signes.
Erez Aiden et Jean-Baptiste Michel, dans leur excellent ouvrage «Culturama», ont analysé la fréquence d’apparition des mots dans la littérature mondiale, et en ont dégagé des tendances très intéressantes, comme, par exemple, l’origine des verbes irréguliers en anglais. Dans la version qui m’avait été donnée par mes professeurs d’anglais quand je faisais mes études, les verbes avaient été tous réguliers mais étaient devenus irréguliers car leur usage massifs les avaient en quelque sorte usés, déformés.
« Culturama » arrive exactement à la conclusion inverse : à l’origine les verbes étaient tous irréguliers et se sont régularisés – à l’exception notable des auxiliaires « être » et « avoir » – par leur usage massif – les locuteurs allant au plus court et ne voulant pas s’encombrer le cerveau en retenant des formes compliquées. Autrement dit, l’évolution d’une langue est d’abord conditionnée par son usage.
Une Parole d’Expert de
Cédric CARTAU
RSSI & DPO
CHU de Nantes – GTH44
Parution le 2 avril 2021